30 mai 2023

Le numérique, est-ce de l’industrie ?

Anaïs Voy-Gillis, Docteure en géographie mention géopolitique, Directrice associée de June Partners, cabinet spécialisé dans la transformation des entreprises en situation complexe est venu échanger sa vision du numérique.

 

Le numérique, est-ce de l’industrie ?

De mon point de vue, nous pouvons dire que le numérique est une industrie. À la fois le numérique est un élément qui peut être déclencheur de certaines révolutions industrielles, il a induit des changements techniques et sociétaux. On a eu dans les années 70, au moment du début de la 3e révolution industrielle, la révolution liée aux technologies de l’information et de la communication, des progrès techniques avec l’essor des découvertes sur certains composants clés du numérique de l’industrie. On pense par exemple aux microprocesseurs chez Intel, qui ont été des accélérateurs des transformations et des transformations notamment dans l’industrie. On parle de 3ème révolution industrielle, de 4ème révolution industrielle certains ont parlé de 5ème révolution industrielle. Mais dans les composants de la 3ème et la 4ème révolution industrielle, nous sommes sur des accélérations des procédés industriels liés à des évolutions techniques qui sont liées au numérique. Le numérique est très lié à l’industrie de ce point de vue-là.

Le numérique peut également être considéré comme une industrie, si on considère la définition de l’industrie, comme l’aspect d’avoir des choses très « processé », la capacité de gérer de la masse, d’un point de vue « donnée ». La 3ème chose c’est que le numérique repose sur des choses extrêmement tangibles, des infrastructures physiques pour communiquer, des objets qui sont le support des logiciels de la couche « soft ». Il n’y aurait pas de numérique sans ordinateur sans câble sous-marin et ces objets sont des résultants de l’industrie et des différentes révolutions industrielles.

 

Notre souveraineté numérique passe-t-elle par la ré-industrialisation ? Par la re-localisation ?

La réponse est « Oui » et « Non ». Oui dans le sens où derrière la notion de souveraineté il y a la notion de ce qu’on maîtrise sur notre territoire, c’est-à-dire notre faculté à ne pas dépendre d’un autre, qui peut être une entreprise. Lorsque l’on regarde la taille de certaines entreprises aujourd’hui, on voit qu’elles sont capables de rivaliser avec certaines nations mais cela peut être une nation, un groupe d’individus, il y a plein de choses qu’on peut considérer, il y a cette notion d’indépendance derrière la souveraineté.

Si on se dit être souverain sur le plan du numérique, c’est à la fois maîtriser la couche de « hard » et la couche de « soft ». C’est-à-dire, c’est comment est-ce que l’on produit une grande partie du « hard » sur le territoire français. Comment est-ce que l’on a des ordinateurs, des microprocesseurs, tous les composants que l’on va retrouver dans les outils de communication sur le territoire français. Comment est-ce que l’on maîtrise les infrastructures physiques nécessaires au numérique avec des acteurs français ?

Ensuite, nous avons toutes les couches « soft », logiciel, algorithme qui pour avoir une souveraineté doit être française. L’enjeu pour être sur cette souveraineté, à travers la ré-industrialisation c’est de décider ce que l’on veut re-localiser, reproduire en France pour être sur un fonctionnement de dépendance choisi et non pas subi. D’autre part, c’est lorsque dans un certain nombre de domaines, que l’on ne perçoit pas forcément et qui sont peut-être moins liés à la ré-industrialisation, si on considère que la partie « soft » est peut-être moins vue comme une activité industrielle, si on ne la maîtrise pas sur le territoire français, alors on aura une ré-industrialisation partielle et je pense que dans tous les domaines nous avons pris du retard par rapport à certains grands acteurs américains ou asiatiques.

 

De quelle manière, une plateforme collaborative devrait-elle selon vous contribuer aux performances des organisations ?

Les plateformes collaboratives sont des outils clés pour travailler ensemble au sein d’une entreprise. Nous nous en servons pour travailler en tant que cabinet de conseil, au sein de nos équipes afin d’échanger ensemble et travailler simultanément sur un document. Nous l’utilisons également avec nos clients et les équipes clients, ce qui nous permet d’avancer ensemble et de travailler sur ces projets de transformation qui sont parfois assez lourds.

Il y a également un enjeu derrière les outils que l’on choisit, qui est l’enjeu d’avoir des outils qui garantissent la sécurité des données, la confidentialité des échanges et qui peuvent prémunir éventuellement de certains risques légaux. Avoir des outils français ou européens est un plus pour ces questions de confidentialité de sécurité.

 

Quelle est l’importance de la commande publique dans le développement d’un écosystème économique et industriel ?

Je considère qu’il y a 4 piliers dans la demande :

  • Le « B to C »: On va essayer de faire en sorte que les consommateurs consomment un peu plus de produits français et permettre de structurer les écosystèmes.
  • Le B to B: Comment les acteurs industriels vont s’approvisionner auprès d’autres acteurs industriels français donc provision France,
  • L’export,
  • La commande publique: La commande publique a un rôle structurant même si elle n’est pas suffisante pour accompagner certains développements, c’est-à-dire elle va garantir des volumes et donc permettre le développement aussi des activités. Là où la commande publique peut jouer un rôle notamment dans le domaine du numérique, nous avons beaucoup d’acteurs français qui sont situés à différents points de la chaîne de valeur, qui sont très performants dans ce qu’ils proposent. Le problème c’est qu’ils n’ont pas la capacité pour un certain nombre d’avoir autant de cas d’usage que des mastodontes américains ou d’autres nationalités. La commande publique peut jouer son rôle, parce qu’elle peut donner des cas d’usage à ses acteurs pour leur permettre de montrer qu’ils savent faire et encourager aussi les acteurs privés de choisir ces solutions et donc de soutenir l’écosystème.

 

 

Quelle est la question que personne ne vous a jamais posée et que vous attendez désespérément que l’on vous pose ?

Peut-être que ce que j’aimerais, c’est que l’on arrive tous collectivement à se dire que c’est incroyablement dur. Que tous les jours on a des raisons de désespérer de se dire que l’on n’y arrivera pas, que les choses ne vont pas dans le bon sens et que collectivement on reste positif en se disant que chaque jour on fournit un effort, mais que chaque jour on peut contribuer à transformer le monde pour le rendre meilleur et en tout cas plus soutenable

 

 

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