25 avril 2023

Fausses nouvelles : comment interpréter les fake news ?

Comment interpréter les fake news ?

Internet et les réseaux sociaux ont transformé l’information. Celle-ci est disponible partout, tout le temps, avec, comme source potentielle, chaque utilisateur. L’information n’est donc plus le privilège des médias, des agences et des journalistes. C’est dans ce nouvel environnement informationnel que les fake news ou infox sont apparues et se sont multipliées. C’est-à-dire des nouvelles qualifiées de fausses informations ou d’informations fallacieuses dont le but est de manipuler ou de tromper le public.

La conséquence de l’explosion des fake news, ou récits alternatifs, est que la vérité apparaît désormais comme une notion relative, les faits étant tout le temps et partout remis en cause. On parle alors de « post-vérité ».

 

Qu’est-ce que la vérité ?

Habituellement la vérité est ce qu’un individu pense être la réalité. Il formalise ses idées à travers le langage qui donne alors des caractéristiques et des limites à sa conception du monde.

Cette brève définition peut nous aider à saisir d’emblée la complexité de la vérité. Tout homme pourra donc penser être vrai ce qu’il a entendu, vu ou lu dans sa langue. Il suffira d’un bref dialogue entre deux personnes étant nées dans des pays différents, aux coutumes différentes pour s’apercevoir de la difficulté de rendre absolue une vérité. C’est-à-dire d’affirmer qu’une idée peut être vraie en tout lieu et en tout temps.

Ce problème correspond à une vision classique de la logique. Depuis Aristote, en Europe, nous pensons le plus souvent la vérité en deux termes distincts : ou bien une proposition est vraie, ou bien elle est fausse. La science moderne, qui a conduit à d’immenses avancées depuis le XVIème siècle s’est également fondée sur ce principe. Et l’émergence des sociétés démocratiques, depuis le XIXème, repose aussi sur l’idée qu’une société meilleure est possible en la fondant sur des faits considérés objectifs ( comme les niveaux de revenus, les diplômes, etc).

 

Les événements politiques favorisent la diffusion des fausses informations

C’est ce modèle, à la fois philosophique et scientifique du monde moderne, que les phénomènes politiques majeurs des dernières années, l’élection de Trump, le Brexit, la guerre en Ukraine ont remis en cause.

Ils partagent les traits communs d’avoir vu débattre, ou s’affronter, des acteurs qualifiés, comme des journalistes scientifiques ou des universitaires reconnus, et des individus sans qualifications particulières. Cependant, ces derniers ont su s’appuyer sur une rhétorique efficace accordant plus d’importance aux émotions de leurs partisans qu’aux faits établies par la science, les faits et les chiffres.

De la même manière, dans le cadre de la guerre en Ukraine, les comptes officiels des belligérants se livrent à une véritable guerre de l’information. Ils essayent de capter l’attention du public, en déployant simultanément des récits opposés des mêmes événements en passant à la fois par les comptes twitter du ministère de la Défense comme ceux des soldats sur le terrain ou des influenceurs. Ainsi, pour lutter contre la propagation de fausses informations, le secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale s’est doté d’un nouveau service depuis 2021 : VIGINUM. Ce service, technique et opérationnel, est en charge de la protection contre les ingérences numériques étrangères.

Parallèlement, l’émergence récente des logiciels de deepfake (hypertrucage) qui permettent à tout un chacun de créer des fausses vidéos ayant l’esthétique et les voix de vraies personnes, a provoqué un autre basculement. Si les faits et les données chiffrés sont considérés comme pouvant être relatifs, désormais les images et les vidéos ne sont plus des preuves factuelles décisives.

En réaction aux fausses informations, les journaux, en France et dans le monde, ont lancé de nouvelles rubriques dont l’objectif est de vérifier les informations publiées en ligne et sur les réseaux sociaux.

 

Le rôle des réseaux sociaux dans la désinformation

Comme nous le constatons, l’avènement des réseaux sociaux et d’internet a drastiquement changé la puissance des organes d’informations traditionnelles. La « vérité » d’un compte Twitter ayant des millions de followers devient tout aussi puissante que celle, par exemple, des quotidiens Le Figaro ou Le Monde. Or, si les seconds sont des sources considérées comme fiables, la première est celle d’un citoyen, parfois anonyme, dont nous ignorons les motivations et les connaissances réelles.

Ainsi, de manière simple et brutale, les réseaux sociaux ont offert la possibilité de propager des informations vérifiables, ou non, à une vitesse sans précèdent. Il est donc devenu possible de créer publiquement, même sans preuve, à l’aide de quelques centaines de mots, des récits alternatifs. C’est ce nouvel état de fait dans le discours public qui a mené à parler de post-vérité.

En effet, la multiplication des informations peut donner, d’une part, le sentiment qu’il est impossible de discerner le vrai du faux. Et d’autre part, le sentiment que toute personne a la légitimité de s’exprimer sur tous les sujets. Ce qui revient à nier qu’une personne ayant du savoir est plus à même de parler sur ce qu’elle connaît qu’une autre. L’idée de post-vérité est donc dangereuse. Elle marque une rupture entre les citoyens d’un pays qui ne s’accordent plus sur la reconnaissance de la valeur du travail effectué en amont.

Paradoxalement, la violence dans les débats à propos des informations vs. fausses informations signifie pourtant que nous croyons à l’idée de vérité. Quand sur un plateau de télévision, nous mettons face à face des opposants politiques c’est que nous pensons que l’un doit avoir tort et l’autre raison. La confrontation apparaît nécessaire pour savoir lequel est le plus proche de la vérité. Ainsi, l’idée de vérité est plus vivante que jamais.

 

Face à la crise de la légitimité de la parole, afin de savoir « qui dit vrai ? » dans tout débat, nous pouvons être des spectateurs actifs. Pour cela, nous pouvons nous poser les questions suivantes qui nous permettront de discerner : qui parle ? Le discours de la personne est-il fondé ? A-t-elle eu accès à des faits spécifiques connus ou inconnus ? Ses sources semblent-elles solides ou pas ? S’appuie-t-elle sur la raison ou sur l’émotion ?

Par ailleurs, l’arrivée en force de l’intelligence artificiel, comme ChatGPT, va nous obliger à sourcer de plus en plus l’information. Il va devenir de plus en plus essentiel de s’assurer que ce que nous lisons, ce que nous voyons et ce que nous entendons, est fiable.

La vérité n’est donc pas morte, elle attend simplement que l’on y prête plus attention.

 

 

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